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Fortifications et patrimoine

Le blog de l'Ami du Patrimoine

Le Monument National du Hartmannswillerkopf

Cet article vous présente un travail qui diffère un peu des thèmes habituels puisqu'il est question d'un important lieu de mémoire de la Première Guerre mondiale. Cette modélisation 3d, la plus vaste réalisée à ce jour, montre le Monument National du Hartmannswillerkopf dans son état actuel en faisant abstraction de tout aménagement contemporain (mâts, projecteurs, rambardes). Le projet s'est déroulé au cours de l'été 2023 à la demande du CMNHWK pour être présenté lors des Journées nationales de l'architecture. La visite avec photos actuelles du site mémoriel du Hartmannswillerkopf sera présentée ultérieurement.

 

Hartmannswillerkopf signifie littéralement « le mont dominant Hartmannswiller ». L’origine du nom est dérivée du terme germanique Hart signifiant la forêt. La plus ancienne mention écrite remonte à 1187 mais ce n’est que durant la Grande Guerre que la montagne devient tristement célèbre. C’est durant la Grande Guerre que la montagne est surnommée Vieil Armand par des journalistes.


Au déclenchement du premier conflit mondial, le sommet du Hartmannswillerkopf reste ignoré par le commandement français malgré sa position dominante sur les positions avant et arrières des lignes allemandes. Ce n’est que fin décembre 1914 que le promontoire situé à 956 mètres d’altitude entre dans le plan d’attaque français. Les premiers affrontements se font entre patrouilles d’éclaireurs avant de se poursuivre en une terrible guerre de position.


Les pertes sont difficiles à évaluer d’autant plus que dans le cas du Hartmannswillerkopf, la question est devenue un mythe. Encore en 2015, cent ans après le début de la bataille, un panneau évoque 30 000 morts. Néanmoins, le recoupement des sources permet de dénombrer côté français environ 2300 morts, 7000 blessés et 5300 disparus, quant au côté allemand, environ 2200 morts, 5700 blessés et 2800 disparus.
Dès le conflit et surtout après l’Armistice de 1918, des réflexions sont en cours à propos de la conservation du champ de bataille. En décembre 1918, le capitaine du génie Luguet indique que « L’Hartmannswillerkopf […] résume toute l’histoire de la fortification de campagne pendant la guerre ».

L’Hartmannswillerkopf […] résume toute l’histoire de la fortification de campagne pendant la guerre.

Le site du champ de bataille du Hartmannswillerkopf est finalement classé au titre des Monuments historiques par un arrêté le 2 février 1921. Il devient le premier site de combat de la Grande Guerre à bénéficier d’une telle mesure, la Tête des Faux puis le Linge sont également classés dans les mois qui suivent.


Cependant, les touristes n’ont pas attendu le classement du champ de bataille pour venir le visiter. L’accès au site était assez périlleux car il n’existait pas encore de route permettant d’accéder au sommet du Hartmannswillerkopf. A cet effet, une route fut spécialement construite au départ d’Uffholtz pour pouvoir accueillir ces touristes.

Le premier site mémoriel pérenne au champ de bataille après la guerre est la nécropole nationale du Sillberloch, qui remplace un cimetière provisoire créé en janvier 1915. Elle est officiellement inaugurée le 1er octobre 1922.

Vue depuis le pieds de la nécropole.
Dans la nécropole.
Partie supérieure de la nécropole.

En 1920, un comité issu du Souvenir Français est constitué sous la présidence du général Tabouis, ancien officier qui a commandé au Hartmannswillerkopf dans le but d'ériger un monument sur la montagne. Toutefois, le lancement du projet est ralenti par le classement du champs de bataille titre des Monuments historiques. 

En 1925, Robert Danis, directeur de l'architecture et des beaux-arts d'Alsace et de Lorraine présente son nouveau projet à l'occasion de l'exposition des Arts décoratifs de Paris. Ce dernier propose une crypte, aménagée à proximité de la nécropole nationale du Silberloch. Les travaux débutent la même année, alimentés grâce à l'aménagement d'une nouvelle route depuis Uffholtz.

La crypte est semi-enterrée afin de mieux s'intégrer au paysage et rappelle aussi par ce principe, aux fortifications de Vauban dont l'architecte a contribué au classement de ces fortifications au titre des Monuments historiques.

Accès au monument depuis la route des crêtes.

Le Monument National du Hartmannswillerkopf est inauguré en 1932 en présence du Président de la République Albert Lebrun. Le Monument se compose de deux parties : un autel de la patrie qui domine la nécropole et la crypte accessible par une allée de 80 mètres symbolisant une tranchée. C’est l’un des quatre monuments nationaux français de la Grande Guerre. Les autres se trouvent à Dormans (Marne), Verdun (Meuse) et à Notre-Dame-de-Lorette (Pas-de-Calais).

L'esplanade du Monument National.

L'entrée de la crypte est encadrée par deux caryatides, œuvres du sculpteur Antoine Bourdelle (1925). Au-dessus, le fronton est marqué par l'inscription « 1914 Hartmannswillerkopf 1918 » dans le cadre de la réconciliation franco-allemande en lieu et place de l'ancienne inscription patriotique « Ici reposent des soldats morts pour la France ».

L'entrée de la crypte.

L'entrée de la crypte est fermée par une grille en fer décorée dans un style moderne. On peut reconnaitre un soleil rayonnant renchérit par la locution latine Ad lucem perpetuam signifiant vers la lumière éternelle.

La grille fermée depuis le vestibule d'honneur.
La grille ouverte depuis le vestibule d'honneur.

La première salle de la crypte est le vestibule d'honneur. C'est dans cette pièce que l'on peut découvrir l'ensemble des unités ayant stationnée sur le champs de bataille du Hartmannswillerkopf. S'agissant à l'origine d'un monument construit par les Français pour les Français, ce n'est que récemment que les unités allemandes ont été ajoutées sur deux chevalets.

Les numéros d'unités sont regroupées par spécialités sur six plaques en bronze : régiments d'infanterie, d'artillerie, compagnies du génie, bataillons de chasseurs alpins, etc.

Vue d'ensemble du vestibule d'honneur.
Première plaque, côté gauche.
Deuxième plaque, côté gauche.
Troisième plaque, côté gauche.
Première plaque, côté droit.
Deuxième plaque, côté droit.
Troisième plaque, côté droit.
Chevalet avec le nom des unités allemandes, côté gauche.
Chevalet avec le nom des unités allemandes, côté droit.

Un long escalier à pente douce permet d'accéder au cœur de la crypte.

L'escalier descendant à la crypte.
Perspective sur le bouclier et la Vierge à l'Offrande de Bourdelle.
Au pied de l'escalier menant à la crypte.

La crypte du Monument National est la pièce maîtresse de ce lieu de mémoire. Il s'agit d'une pièce assez vaste de forme carrée soutenue par quatre colonnes cannelées sans chapiteaux.

Vue d'ensemble de la crypte.
Vue sur le plafond de la crypte.
Le visiteur attentif pourra remarquer cette croix.

Au centre, un bouclier en bronze recouvre un ossuaire où repose les restes de soldats non identifiés. De part et d'autre, le bouclier est décoré par des feuilles de lauriers où est posé un glaive et son fourreau. Au centre, se trouve un bouclier où le terme patrie est inscrit. Sur ce bouclier est installé une lanterne des morts.

Le bouclier renfermant l'ossuaire.

Tout autour de la bordure du bouclier, on peut lire une référence à Victor Hugo issus du recueil de poèmes paru en 1835.

 

Ceux qui pieusement sont morts pour la patrie - Ont droit qu'à leur cercueil la foule vienne et prie.

Victor Hugo - Les Chants du crépuscule

Le bouclier avec comme arrière-plan la chapelle catholique.
Le bouclier avec comme arrière-plan la chapelle protestante.
Le bouclier avec comme arrière-plan la chapelle israélite.

Tout autour du bouclier se trouve trois chapelles faisant écho aux trois religions concordataires d'Alsace et de Moselle, de gauche à droite : la religion protestante, la religion catholique et la religion israélite.

Autel protestant.
Autel israélite.
Autel catholique.

Retournons en arrière pour découvrir les dessus du Monument National du Hartmannswillerkopf. 

L'esplanade du Monument National.

La crypte est surmontée d'une esplanade au milieu de laquelle se trouve un autel de la Patrie, copie conforme de l'autel élevé au milieu du Champ-de-Mars à Paris pour la fête de la Fédération le 14 juillet 1790.

Vue aérienne de l'esplanade de l'autel de la Patrie.

L'autel de la Patrie du Monument National du Hartmannswillerkopf est orné des blasons des villes d'Alsace et de Moselle, ainsi que par des villes des quatre coins de la France.

L'esplanade de l'autel de la Patrie.
L'autel de la Patrie.
L'autel de la patrie, face ouest.
L'autel de la patrie, face sud.
L'autel de la patrie, face est.
L'autel de la patrie, face nord.

 

Bibliographie

François Cochet, Jean-Noël Grandhomme (dir.), Guerre des Vosges et guerres de montagne, 1914-1918 (actes du colloque international), Paris, Bernard Giovanangeli éditeur, 2016.

Comité du Monument National du Hartmannswillerkopf, Hartmannswillerkopf 1914-1918. Guide du champ de bataille, CMHHWK, Colmar, 2020.

Comité du Monument National du Hartmannswillerkopf. Hartmannswillerkopf. Le livret de l’historial franco-allemand de la Grande Guerre, CMNHWK, Colmar, 2017.

Comité du Monument National du Hartmannswillerkopf. 1921-2021 « Qu’on le classe ». Centenaire du classement du Hartmannswillerkopf au titre des Monuments historiques. Catalogue d’exposition (CMNHWK), Colmar, 2021.

Nicolas Lefort, Michel Spitz, Hartmannswillerkopf : monument national de la Grande Guerre, Eckbolsheim, Éditions du Signe, 2015.
 

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